COURS DE DROIT LES FORMES DE L’ETAT
LES FORMES DE L’ETAT (1ERE PARTIE)
- L’Etat peut prendre plusieurs formes. Certaines sont relativement classiques, comme la
forme de l’Etat unitaire et de l’Etat fédéral mais il existe aussi des distinctions moins nettes,
comme les Etats régionaux.
I. L’ETAT UNITAIRE
- La définition de l’Etat unitaire : Il s’agit d’un Etat au sein duquel il n’existe qu’un seul
appareil étatique, et cet appareil d’Etat est le seul doté de la plénitude de sa souveraineté.
- Dans un Etat unitaire, les normes locales ne peuvent être édictées qu’en application et en
conformité de normes nationales préalables. Dans l’expression pure de l’unité de l’Etat, les
citoyens sont soumis aux mêmes pouvoirs (on parle d’unité de constitution) et aux mêmes
lois (unité de législation), au même gouvernement, aux mêmes tribunaux. Aucune
organisation politique ne peut le concurrencer et, par hypothèse, les gouvernants sont en
contact direct avec les gouvernés et avec les autres Etats.
- Il s’agit de la forme la plus répandue d’Etat : France, Irlande, Pologne, Algérie, Thaïlande
etc...
- L’exemple avec la France : En France l’art. 1er de la Constitution de 1958 précise que la
France est une République indivisible (...). Son organisation est décentralisée ».
- Déjà l’Assemblée constituante de 1792 avait proclamé que « La France est une et
indivisible » (pour contrer l’influence de l’organisation fédéraliste américaine, on avait même
institué la peine de mort pour tous ceux qui évoquaient l’idée d’un fédéralisme en France).
En réalité, la forme pure de l’Etat unitaire n’est pas en phase avec les contraintes du pouvoir.
Historiquement, on a eu des Etats unitaires centralisés (tous les pouvoirs et toutes les
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compétences étaient détenus au niveau central, et il n’y avait pas du tout d’autonomie
locale).
- Mais, on s’aperçoit rapidement que l’administration de proximité était nécessaire (ne
serait-ce que parce qu’une décision prise à Paris mettait plusieurs semaines à arriver à
Marseille...).
- Etat unitaire ne signifie pas absence de subdivisions : bien évidemment, dès lors que l’Etat
excède une certaine taille, il est nécessaire d’organiser des relais entre le pouvoir central et
la population, permettant à l’administration d’être au plus près du citoyen.
On peut soit procéder à une déconcentration soit à une décentralisation, soit, le plus
souvent, aux deux en même temps :
- La Déconcentration : l’Etat va nommer des entités pour le représenter à l’échelle locale
(Préfet, service des impôts, Direction départementale de l’Equipement,...) : ces structures
sont des démembrements locaux de l’Etat central, vont agir sous ses ordres, pour son
compte, avec des agents de l’Etat, en cas de préjudice causé du fait de leur fonctionnement,
c’est la responsabilité de l’Etat que l’on engage, ...
- La Décentralisation : on confie des attributions propres à des autorités locales, élues par
les citoyens locaux. En France, les collectivités territoriales bénéficient d’une libre
administration garantie non pas par la Constitution, mais par la loi : art. 72 de la
Constitution : « Dans les conditions prévues par la loi, ces collectivités s'administrent
librement par des conseils élus et disposent d'un pouvoir réglementaire pour l'exercice de
leurs compétences ».
II. A mi-chemin du fédéralisme : LA
CONFÉDÉRATION D’ETATS
- La Confédération d’Etats peut être définie comme une Association d’Etats au sein de
laquelle ceux-ci décident de coopérer dans certains domaines tout en conservant leur
souveraineté.
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- La confédération, contrairement à la fédération, ne repose pas sur une Constitution, mais
sur un traité. Les décisions importantes sont prises à l’unanimité. Une confédération n’a pas
l’ambition de créer un Etat.
- Mais, souvent, c’est une confédération qui préfigure une fédération : ainsi, les USA sont
issus de la Confédération des Etats-Unis d’Amérique du Nord (entre 1778 et 1787) ;
confédération helvétique créée au 14ème siècle, jusqu’à devenir un Etat fédéral en 1848 ;
confédération germanique entre 1815 et 1866 (contenant l’Autriche), remplacée par la
Confédération d’Allemagne du Nord, puis en Empire fédéral allemand en 1871 (Reich), ...
III. L’ETAT FÉDÉRAL
- Un Etat fédéral peut être défini comme un Etat composé d’un certain nombre d’entités
(Etats fédérés, cantons, provinces, ...) qui ont l’apparence d’un Etat (Constitution, Parlement,
Gouvernement, Tribunaux, ...), mais qui ne disposent pas de tous les attributs de l’Etat : pas
de souveraineté externe (pas de relation directe avec l’étranger), souveraineté interne
limitée (par la Constitution de l’Etat fédéral). Les Etats fédérés ne sont pas réellement des
Etats.
- La structure fédérale apparaît en 1787 aux Etats Unis : Etats préexistants qui décident de
s’unir (hypothèse « classique » de formation d’un Etat fédéral : Allemagne et Suisse par
exemple).
- L’Etat fédéral permet de bénéficier des avantages de l’Etat unitaire sans les inconvénients ;
Etat unique permet une simplification de l’organisation administrative pour des secteurs
clés (et couteux) armés, diplomatie, voies de communication, ... Il permet de mettre en place
un marché commun, facilite les échanges, permet le développement économique. En même
temps, les entités fédérées ont, en s’associant, plus de poids sur la scène internationale. Elles
ne perdent pas, pour autant, leur spécificité.
- Problème : risque de tensions entre Etat fédéral (qui va parfois s’estimer plus à même de
gérer certaines problématiques, ce qui impliquera de réduire l’autonomie des Etats fédérés)
et Etats fédérés (qui souhaitent conforter leur autonomie). Ainsi, en Allemagne et en Suisse,
la Constitution a été plusieurs fois révisée pour faire passer des compétences au niveau
fédéral.
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- Comme l’explique Georges Scelle : une construction fédérale repose sur deux principes
principaux : le principe de participation et le principe d’autonomie. (On trouve aussi un
troisième principe, le principe de superposition. Le principe de superposition implique que
l’ordre juridique d’un Etat de forme fédérale est caractérisé par la superposition de deux
ordres juridiques, impliquant un exercice partagé des compétences.
1. Le principe d’autonomie
- Les Etats fédérés disposent d’une liberté d’organisation : ils élaborent leur propre
constitution, organisent leurs pouvoirs publics (parlement, gouvernement), dans le respect
de la Constitution fédérale.
- Le plus souvent, la Constitution fixe limitativement les compétences de l’Etat fédéral,
toutes les autres matières sont laissées aux Etats fédérés (comme aux Etats Unis par
exemple) : c’est pourquoi on trouve de grandes disparités entre les droits des Etats fédérés
(33 des 50 Etats appliquent la peine de mort ; l’Etat de l’Ohio considère que l’énergie
nucléaire est une énergie renouvelable, ...).
- Parfois, c’est l’inverse : la Constitution fixe les compétences des Etats fédérés et le reste
incombe à l’Etat fédéral, c’est le cas au Canada où les provinces ont des compétences
résiduelles (d’où la permanence du problème québécois).
- La Loi fondamentale allemande, quant à elle, prévoit un système mixte : système de
compétence exclusives de l’Etat fédéral, comme aux USA, tout le reste relève des Länder :
(article 70 de la loi fondamentale : les Länder ont le droit de légiférer dans tous les domaines
pour lesquels la loi fondamentale n’a pas prévu de compétence exclusive de l’Etat. Sauf loi
contraire, dans les domaines exclusifs, les Länder ne peuvent pas légiférer : art. 71).
- On retrouve dans le cas de l’Allemagne un système de compétences concurrentes : Dans les
compétences concurrentes : principe de subsidiarité : ils peuvent intervenir aussi longtemps
que le pouvoir fédéral n’intervient pas : art. 72. On autorise même, dans certaines matières
limitativement énumérées (environnement, aménagement du territoire, ...), les Länder à
adopter des législations qui s’écartent du droit fédéral. (Même logique de compétences
exclusives, compétences concurrentes en Suisse, en Inde et en Autriche)
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- En général, l’Etat fédéral est compétent pour : l’armée, la souveraineté externe,
compétence pour signer les traités (exception, notamment, pour le Canada : le Québec qui
possède une délégation générale en France). Les Etats fédérés ont un pouvoir de lever
l’impôt, compétence en matière de droit de la famille, commerce, ...
- Les conflits de compétences entre ces deux niveaux sont réglés par une Cour suprême.
2. Le principe de participation
- Les Etats fédérés participent à l’organisation de l’Etat fédéral ainsi qu’à la révision de la
Constitution fédérale. Dans la Loi fondamentale allemande, ce principe est même
constitutionnellement protégé : art. 79.3 : « Toute modification de la présente Loi
fondamentale qui toucherait à l’organisation de la Fédération en Länder, au principe du
concours des Länder à la législation (...) est interdite ».
- L’Etat fédéral a sa propre Constitution (Cf. doc. Loi fondamentale Allemande).
Sa constitution peut être modifiée, en général, selon l’accord d’une majorité des Etats
fédérés. Donc, ça signifie que si la Constitution initiale a été approuvée par tous (puisque ce
sont les Etats fédérés qui l’ont rédigée), elle peut être modifiée contre l’avis de certains.
Néanmoins, en vertu du principe de participation, chaque Etat fédéré doit faire connaître son
point de vue avant toute modification de la Constitution.
- En ce qui concerne la participation à l’organisation de l’Etat :
- En général, chaque Etat fédéral comprend un Parlement composé de deux
chambres : l’une représente les Etats fédérés (Sénat pour les USA, Bundesrat pour
l’Allemagne, Rajya Sabha pour l’Inde), selon un principe d’égalité (c’est-à-dire que le nombre
de représentants ne dépend pas du nombre d’habitants : ainsi, au Sénat américain, chaque
Etat fédéré est représenté par 2 sénateurs) ; l’autre représente le peuple (Chambre des
représentants, Bundestag, Lok Sabha), selon une représentation proportionnelle à la
population des Etats fédérés.
- Ainsi, en All., art. 50 de la loi fondamentale : Représentation des Etats fédérés dans
le Bundesrat : participation à la législation, à l’administration de l’Etat fédéral et aux affaires
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de l’Union européenne. Néanmoins, contrairement aux USA, la représentation de chaque
Land au Bundesrat n’est pas égalitaire, mais proportionnelle au nombre d’habitants (art. 51 :
tous les Länder ont au moins 3 voix ; 4 voix pour les Länder de plus de 2 millions d’hts ; 5
pour + de 6 millions ; 6 pour + de 7 millions).