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vendredi 21 février 2020

L’évolution des conditions d’emploi

  droitenfrancais       vendredi 21 février 2020


L’évolution des conditions d’emploi






I) La compréhension du problème

A) Le problème juridique

L’évolution des conditions d’emploi pose 2 questions :
- L’employeur peut imposer au salarié un changement de ses conditions de travail ?
- Celui ci peut il refuser sans risquer une sanction ?
Il existe en la matière une vraie difficulté juridique, car la relation de travail salarié repose sur 2
règles de droit contradictoires dans l’hypothèse d’une évolution des conditions d’emploi :
- Le caractère contractuel de la relation de travail  C’est le contrat de travail qui définit les
conditions d’emploi du salarié (fonctions occupées, horaires, lieu de travail, rémunération). Mais,
selon le principe général de la force obligatoire du contrat, il n’est pas possible de modifier
unilatéralement ce qui a été défini contractuellement. Il faut impérativement recueillir l’accord de
l’autre partie.
- Le lien de subordination qui caractérise toute relation de travail salarié  Le salarié est placé sous
l’autorité de son employeur qui dispose d’un pouvoir de direction lui permettant :
- De prendre seul les décisions relatives au fonctionnement de l’entreprise
- De sanctionner les salariés en cas de faute
Entre ces 2 règles contradictoires, il faut déterminer celle qui doit prévaloir en cas d’évolution des
conditions d’emploi.



B) La réponse des tribunaux

La jurisprudence distingue 2 hypothèses dont le régime juridique est différent :
- Le simple changement des conditions de travail que l’employeur peut imposer unilatéralement
- La modification du contrat de travail qui suppose l’accord du salarié
Pour qualifier juridiquement les situations litigieuses qu’ils ont à trancher, les tribunaux se basent
sur l’objet de la modification envisagée par l’employeur, objet qui est le critère de distinction entre
ces 2 hypothèses aux conséquences opposées.

II) Les modifications nécessitant l’accord du salarié

A) Définition

Modifications qui affectent un élément essentiel de la relation de travail ayant déterminé la
décision du salarié d’accepter le contrat.
Selon la jurisprudence, on distingue :
- Les éléments essentiels par nature  Ce sont toutes les conditions d’embauche qui fondent
l’accord des parties dans tout contrat de travail, quels que soient l’employeur, le salarié et le poste
occupé.
- Les éléments rendus essentiels par la volonté des parties dont on dit qu’ils n’ont pas été
contractualisés  Les clauses contractuelles

B) Les principaux éléments essentiels par nature

1) La rémunération
La rémunération prévue au moment de l’embauche constitue un élément essentiel du contrat de
travail qu’il s’agisse du salaire de base ou des compléments de salaire.
Aucune modification ne peut y être apportée sans l’accord du salarié, même si elle est minime.
Il existe cependant une exception pour l’application d’une disposition conventionnelle ou légale
plus favorable au salarié. Il n’est pas nécessaire d’avoir l’accord du salarié pour mettre en œuvre
une mesure d’augmentation du SMIC ou du salaire conventionnel.
2) La durée du travail
La durée du travail définie à l’embauche d’un salarié constitue un élément essentiel et contractuel





de la relation de travail. L’employeur ne peut donc ni réduire/augmenter la durée du travail d’un
salarié sans son accord.
Ainsi, il est impossible d’imposer à un salarié qui travaille à temps partiel de passer à temps
complet ou inversement.
Mais il existe une exception pour les hypothèses de réduction négociée de la durée collective de
travail.
La mise en place d’une telle réduction ne requiert pas l’accord de chaque salarié concerné sauf si
cette réduction entraîne une diminution de la rémunération ou de tout autre avantage.
3) Le lieu de travail
En ce qui concerne le lieu travail, la réponse doit être différenciée :
- Le lieu de travail est considéré comme un élément contractuel en ce sens que l’employeur doit
obtenir l’accord du salarié pour le déplacer dans un secteur géographique différent.
Cependant, le salarié qui a signé une clause de mobilité a accepté à l’avance la modification de son
lieu de travail, ainsi l’employeur peut le muter de manière unilatérale dans un secteur
géographique, sous réserve que le lieu de mutation rentre dans le périmètre prévu par la clause.
- Pour un déplacement au sein du même secteur géographique, l’accord du salarié n’est pas
nécessaire.
4) La qualification
Élément essentiel qui détermine le niveau hiérarchique du salarié, donc son niveau de
rémunération, c’est pourquoi sa modification est impossible sans l’accord du salarié.
En revanche, l’employeur peut imposer un changement de poste si le salarié garde la même
qualification et ne perd aucun avantage.

C) Les modalités de modification

1) Le principe
a) L’information du salarié
L’accord du salarié étant une condition de la modification du contrat de travail, l’employeur doit
procéder à son information. Le code du travail ne prévoit pas de forme particulière sauf en cas de
modification pour motif économique. Mais pour des raisons de preuve, il est conseillé de prévoir
une information écrite adressée au salarié par LRAR ou remise en main propre contre décharge.
La loi exige un délai de réflexion suffisant, sans imposer de délai précis. 15 jours de réflexion être
un délai suffisant.
b) L’accord du salarié
Le salarié doit donner à la modification proposée un accord clair non équivoque. En cas d’accord,
un avenant au contrat de travail doit être établi par l’employeur et remis à l’employeur dans le mois
qui suit la modification.
c) Le refus du salarié
Le refus du salarié rend impossible la modification envisagée par l’employeur. Celui ci a 2
possibilités :
- Renoncer à la modification du contrat qui continue selon les modalités initialement convenus
- Licencier le salarié si la modification est justifiée par l’intérêt de l’entreprise.
2) Le cas particulier de la modification pour motif économique
Lorsque la modification envisagée est justifiée par un motif économique, le code du travail impose
une procédure précise :
- L’employeur doit adresser au salarié une LRAR pour l’informer du projet de modification et lui
demander son accord. Celui ci dispose d’1 mois pour donner sa réponse, à défaut, il est réputé
avoir accepté la modification proposée par l’employeur.

- En cas de refus du salarié, l’employeur peut soit renoncer à modifier le contrat, soit engager une
procédure de licenciement pour économique.

D) Les cas particuliers

1) La modification pour motif disciplinaire
Certaines sanctions prononcées par l’employeur ont pour conséquence de modifier le contrat de
travail du salarié sanctionné :
- La mutation disciplinaire a pour effet de modifier les fonctions et la qualification du salarié
- La rétrogradation modifie à la fois les fonctions, la qualification et la rémunération du salarié.
Du fait des conséquences de ces sanctions sur le contrat de travail, le salarié peut refuser la
mutation ou la rétrogradation, mais dans ce cas, l’employeur peut prononcer une autre sanction,
notamment un licenciement si la faute est suffisamment sérieuse.
2) La modification pour motif personnel non disciplinaire
 Le motif personnel est un motif inhérent à la personne du salarié (exemple : inaptitude physique/
inadaptation au poste)
 Lorsque l’employeur veut modifier le contrat de travail d’un salarié pour un motif non
disciplinaire 2 hypothèses sont à distinguer :
- Si la modification porte sur un élément essentiel du contrat, le salarié peut refuser, mais
l’employeur peut le licencier
- Si c’est un élément mineur que l’employeur veut modifier, le salarié doit accepter et son refus
peut être sanctionné.

III) Les modifications que l’employeur peut imposer au salarié

A) Le changement des conditions de travail

1) Définition
Ce sont tous les changements qui n’affectent pas un élément essentiel de la relation contractuelle et qui
relèvent du pouvoir de direction de l’employeur. Ces changements portent sur des éléments de la relation de
travail qui n’ont pas joué un rôle déterminant dans la décision du salarié de conclure le contrat de travail. Ils
n’ont que peu d’impact sur sa vie professionnelle/personnelle et n’aggravent pas les conditions dans lesquelles
il exerce son activité.
Ces éléments n’ayant pas été déterminants dans la conclusion du contrat, on considère qu’ils peuvent être
modifiés unilatéralement par l’employeur.
En cas de litige, les tribunaux sont donc amenés à qualifier juridiquement la modification imposée par
l’employeur. Pour cela, ils recherchent d’une part si l’élément modifié était déterminant pour le salarié au
moment de son embauche, et d’autre part si la modification a un impact notable sur sa vie
professionnelle/personnelle.
2) Exemples
a) La modification des horaires de travail
Selon les cas, l’évolution des horaires de travail constitue un simple changement des conditions de travail que
l’employeur peut imposer dans le cadre de son pouvoir de direction, ou au contraire une véritable modification
du contrat de travail.
 Il y a modification du contrat de travail dans les hypothèses suivantes :
- Passage d’un horaire de jour à un horaire de nuit et inversement
- Passage d’un horaire fixe à un horaire variable
- Mise en place d’astreintes, sauf si possibilité est prévue dans la convention collective applicable à
l’entreprise
- Horaires de travail contractualisés
 Dans les autres hypothèses, il s’agit d’un simple changement des conditions de travail que l’employeur peut
imposer au salarié, à conditions que la nouvelle répartition des horaires dans la journée/semaine n’ait d’impact

ni sur la durée du travail du salarié, ni sur la rémunération.

b) Le déplacement du lieu de travail

Il arrive fréquemment que le lieu de travail du salarié soit mentionné dans le contrat de travail, mais cela
n’interdit pas pour autant à l’employeur de le déplacer unilatéralement. En effet, selon la cour de cassation,
cette simple mention constitue seulement une information et n’engage pas l’employeur sauf s’il est clairement
indiqué que le travail s’effectuera exclusivement à cet endroit. Dans ce cas, le lieu de travail est contractualisé
et ne peut être modifié qu’avec l’accord du salarié.
Dans les autres cas, le déplacement du lieu de travail constitue un simple changement des conditions de travail
et peut être imposé au salarié dès lors que 2 conditions sont réunies :
- Le déplacement intervient dans le même secteur géographique
- Le nouveau lieu de travail reste accessible au salarié.
B) Les changements prévus par le contrat de travail
Afin de pouvoir faire évoluer plus facilement les conditions de travail, les employeurs prévoient cette
possibilité dès l’embauche, en faisant figurer dans le contrat de travail une clause spécifique par laquelle le
salarié accepte à l’avance certaines modifications.
L’employeur peut ainsi prévoir une clause de variabilité des horaires ou une clause de mobilité. Dans ces
hypothèses, l’employeur peut imposer un changement d’horaires ou du lieu de travail sans craindre un refus
du salarié.
De telles clauses limitent le risque de litige sur ces questions dont l’appréciation par les tribunaux reste
aléatoire.
Ainsi la clause de mobilité permet à l’employeur d’imposer un changement de lieu de travail même dans un
secteur géographique différent. Si la clause de mobilité signée par le salarié est valable, celui ci est obligé
d’accepter les mutations qui rentrent dans le champ défini par la clause. Son refus constitue une faute
professionnelle pouvant justifier une sanction y compris licenciement.

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