LA DISTINCTION ENTRE LA RESPONSABILITE CONTRACTUELLE ET LA RESPONSABILITE DELICTUELLE EN DROIT MAROCAIN
Quand un
dommage causé à une victime résulte de l’inexécution d’un contrat, la
responsabilité civile est dite « contractuelle », et quand il est causé » en
dehors de tout contrat, la responsabilité est dite « délictuelle ».
Il n’est pas question ici uniquement de contrat écrit comme on l’entend souvent, mais d’un engagement plus immatériel, pouvant être exprès ou tacite, onéreux ou gratuit.
A titre d’exemple, l’adhésion à une association équivaut à un contrat passé entre une association et un adhérent. Contrat que l’association se doit d’honorer.
Ce faisant, les dommages dont pourrait être victime l’adhérent engagerait la responsabilité civile contractuelle de l’association.
En revanche, un visiteur imprévu dans les locaux d’une association et qui subirait des dommages également imprévisibles ne pourrait être indemnisé qu’au titre de la responsabilité délictuelle de l’association, soit « extracontractuelle » en dehors de toute responsabilité pénale.
Pour autant, cette distinction est parfois bien difficile à établir par les tribunaux eux-mêmes, un même événement pouvant engager la responsabilité contractuelle d’une association envers certaines personnes et sa responsabilité délictuelle envers d’autres.
Entre la responsabilité civile et pénale il existe une dualité fonctionnelle, la responsabilité pénale ayant pour objectifs de neutraliser des individus nuisibles à la société et de les réadapter et la responsabilité civile étant tournée vers la réparation du préjudice causé, même s’il est vrai que, dans une certaine mesure, la sanction pénale et la sanction civile répondent aussi l’une et l’autre à un double désir de punition et d’intimidation, ou de dissuasion.
Il ne s’agira pour nous de traiter que des responsabilités contractuelle et délictuelle à l’exclusion de la responsabilité pénale.
La responsabilité civile délictuelle est prévue par les articles 77 à 106 du Dahir des Obligations et des Contrats (ci-après DOC). La responsabilité contractuelle s’engageant par l’inexécution d’une obligation contractuelle.
Par ailleurs, la responsabilité civile trouve sa source dans le quadrige romain auquel s’ajoute la loi.
L’intérêt de cette distinction se confine dans une double allure, c’est une arme à double détente : d’une part, la responsabilité civile permet a priori la prévention du dommage, et d’autre part elle a pour objectif a posteriori la réparation.
De ce qui précède se pose la problématique de savoir quid à propos des traits tant distinctifs que communs aux deux types de responsabilité ?
Pour pouvoir répondre à cette problématique, l’approche la plus probante pour exhiber la philosophie générale du sujet serait de traiter d’une part les spécificités des deux responsabilités contractuelle et délictuelle (I) et d’autre part étaler les critiques sur cette distinction (II).
I – SPÉCIFICITÉ DES DEUX RESPONSABILITÉS
A – la responsabilité contractuelle
1. La nature des obligations
2. Les limitations conventionnelles
B – la responsabilité délictuelle
1. La responsabilité du fait personnel
2. Les responsabilités complexes
II – CRITIQUES SURLA
DISTINCTION
A – interférence des deux responsabilités
1. la mise en œuvre des deux responsabilités
2. Les possibilités d’exonération
B – principe du non cumul de responsabilité
1. Consécration du principe indemnitaire
2. Prééminence de la responsabilité contractuelle
I – SPÉCIFICITÉ DES DEUX RESPONSABILITÉS
La responsabilité civile n’est pas régie par les mêmes dispositions selon qu’il s’agisse d’une responsabilité civile contractuelle (A) ou une responsabilité délictuelle (B).
A – la responsabilité contractuelle
Le quantum des dommages intérêts et l’appréciation de la faute est différente selon la nature de l’obligation (1) et selon l’existence ou le défaut de limitations (2).
1. la nature des obligations
C’est DEMOGUE, en 1928, qui en voulant concilier entre les articles 1134 et1147 a distingué entre les
obligations de résultat et les obligations de moyen.
Le régime juridique diffère selon que l’on se trouve en présence d’une obligation de moyen ou d’une obligation de résultat.
En matière d’obligation de résultat, l’inexécution de celle-ci doit conduire à la réparation. Ce principe subit des exceptions chaque fois que l’inexécution sera justifiée par la force majeure.
Il s’agit d’un événement imprévisible, irrésistible et invincible selon la définition donnée par la jurisprudence.
Ainsi en est-il du contrat formé entre le patient et son médecin qui met à la charge de ce dernier, sans préjudice de son recours en garantie, une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne les matériels qu’il utilise pour l’exécution d’un acte médical d’investigation ou de soins.
Par contre, en matière d’obligation de moyen, on peut admettre qu’il ne peut y avoir que quelques cas dans lesquels la réparation du préjudice sera possible. En raison du fait que le créancier accepte dés le départ l’éventualité de l’inexécution de l’obligation, Le débiteur sera exonéré chaque fois qu’il aura fait son possible pour s’acquitter de son obligation. Il reste au créancier de prouver le contraire ou plus souvent de prouver une faute du débiteur pour obtenir la réparation.
Dans le domaine du contrat médical, le médecin est tenu d’une obligation de moyen. L’obligation pesant sur un médecin est de donner des soins conformes aux données acquises de la science à la date de ses soins ; le moyen qui se réfère à la notion, erronée, de données actuelles, est donc inopérant.
De même, la faute ne peut se déduire de la seule absence de réussite de l’acte médical et de l’apparition d’un préjudice, lequel peut être en relation avec l’acte médical pratiqué sans l’être pour autant avec une faute. L’existence d’une faute ne peut se déduire de la seule anormalité d’un dommage et sa gravité.
Il convient de signaler que certaines obligations sont aujourd’hui appelées obligations de moyen renforcées ou aggravées. On assiste souvent, en effet, à des contrats médicaux qui se rapprochent de ceux comprenant des obligations de résultat en matière de chirurgie esthétique.
Plus de la simple faute professionnelle, on s’approche de l’évaluation du résultat selon les mécanismes utilisés pour les obligations de moyen.
On constate dés lors que l’obligation de moyen n’est plus un mode d’engagement à l’abri de la sévérité de l’appréciation et de l’évaluation objective de la défaillance.
2. les remaniements conventionnels
C’est le contenu de l’obligation qu’il faut prendre en considération. Autrement dit, plus il y a d’obligations à la charge du débiteur, plus la possibilité de voir sa responsabilité contractuelle engagée est grande.
C’est les parties au contrat, de par l’autonomie et la liberté contractuelle dont ils jouissent, qui peuvent tant aggraver ou dégraver leur situation. Il existe donc des :
- Clause aggravante de responsabilité : C’est le cas des garanties conventionnelles ajoutées aux garanties légales.
- Clause restrictive de responsabilité (Clause limitative de responsabilité, Clause exonératoire de responsabilité).
Les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité sont nulles lorsqu’il s’agit d’une faute dolosive ou intentionnelle. Cette idée trouve sa source dans le principe romain CULPA LATA DOLO AEQUIPARATUR.
En général, les clauses limitatives ne jouent plus lorsqu’il s’agit de :
• Transport ;
• Droit de réparation du consommateur ;
• Produit défectueux ;
• Responsabilité du constructeur immobilier ;
• Dol
• Faute grave de négligence.
Par ailleurs, les parties peuvent insérer une clause pénale, qui est une clause par laquelle le débiteur s’engage en cas d’inexécution ou d’exécution à verser au créancier une somme forfaitaire définie à l’avance. Cette clause pénale se présente plus comme un moyen de pression permettant d’éviter les tribunaux.
Certaines clauses pénales sont prohibées par la loi lorsqu’il s’agit de:
*Bail ;
*Droit du travail ;
*Crédit.
Il faut noter aussi que le juge, s’il estime que le montant de la clause pénale est dérisoire ou trop élevé pourra le modifier. Toutefois il ne pourra pas baisser le montant à un montant inférieur au préjudice subi. Il n’est pas tenu par la qualification donnée par les parties.
Il ne faut pas perdre de vue également la prohibition des clauses abusives (qui ne semble plus protéger, désormais, que les consommateurs en tant qu’ils sont des personnes physiques, à l’exclusion des personnes morales) et qui permettrait de réputer non écrites de telles clauses d’exclusion de responsabilité.
B – la responsabilité délictuelle
L’appréciation de la responsabilité civile délictuelle est différente selon qu’il s’agisse d’une responsabilité du fait personnel (1) ou d’une responsabilité complexe (2).
1. la responsabilité du fait personnel
La responsabilité du fait personnel constitue un fait commis par une personne qui a ainsi causé un dommage à autrui.
Il y a en fait trois conditions pour engager la responsabilité civile délictuelle du fait personnel de quelqu'un, ces conditions sont assez "générales" dans le sens où l'on retrouvera la notion de faute et celle de dommage ailleurs que dans la responsabilité du fait personnel, ces trois conditions sont d’abord la faute, ensuite le dommage et enfin le lien de causalité.
Qu'est ce qu'une faute ? La jurisprudence va poser que la faute est l'erreur ou la défaillance de conduite. Il n'y a pas de réelle définition de la faute. Tel comportement n'est pas assimilé forcément à une faute dès le départ. C'est une notion "standard", ce qui signifie que son contenu dépend des circonstances. La jurisprudence a appliqué l’alinéa 2 de l’article 78 du DOC sur les quasi-délits pour la définition de la faute intentionnelle.
La faute est une notion entièrement objective. Cela signifie que si c'est apprécié en fonction des circonstances ce n'est pas apprécié en fonction du sujet "fautif".
La règle édictée par l’article 77 du DOC ne souffre d’aucune exception parce que le législateur la considère comme étant d’ordre public, cet article dispose in fine : * toute stipulation contraire est sans effet *.
Cette responsabilité ainsi exprimée comporte dans sa règle des éléments qui mettent en valeur :
le caractère contraire à la loi c'est-à-dire illégal : le dommage qui serait causé dans un contexte légal ne serait pas mis à la charge, ni inclus dans la responsabilité de son auteur ;
l’intention et la volonté de causer un dommage : toutefois l’article 78 du DOC vise aussi le dommage non intentionnel c'est-à-dire le dommage causé par la faute est défini comme consistant soit a omettre ce qu’on était tenu de faire soit à faire ce dont on était tenu de s’abstenir sans intention de nuire ;
le lien de causalité doit être établi qu’il s’agisse d’une faute intentionnelle ou non intentionnelle.
Il faut relever que l’article 78 ne vise pas seulement la commission du fait dommageable mais aussi l’abstention et les dommages causés par omission.
Ce qui compte pour la loi c’est la relation directe entre la faute et le dommage (sublata causa tollitur effectus : il n’y a pas d’effet sans cause) parce que le législateur a voulu assurer une protection aux victimes qui n’ont pas contribués au dommage qu’ils ont subi et à qui le préjudice a été causé par autrui, ce qui fait abstraction à la question de savoir * si l’auteur en causant le dommage a oui ou non tiré un profit quelconque de la situation *.
2. les responsabilités complexes
Un dommage se réalise toujours à la suite d’un concours de faits multiples et d’un enchainement de circonstances. La réparation à laquelle il peut donner dieu est, soit une responsabilité personnelle, soit une responsabilité complexe.
Lorsque le dommage suppose un intermédiaire qui obéit plus ou moins à celui qui le dirige (un enfant, une automobile), on ne peut dire qu’il résulte d’un fait immédiat de son auteur. La responsabilité à laquelle il peut donner lieu n’est plus une responsabilité du fait personnel, mais une responsabilité complexe. La responsabilité se détache alors plus ou moins de la faute, soit sur le terrain de la preuve, soit sur celui du fond du droit.
La responsabilité civile du fait d’autrui a connu une évolution similaire à la responsabilité du fait des choses mais cette évolution fut tout à la fois plus tardive et plus limitée.
A l’origine du Code civil, l’article 1384 du code civil français (article 85 du DOC) ne prévoyait que 5 hypothèses de responsabilité du fait d’autrui :
- La responsabilité des parents du fait de leurs enfants ;
- La responsabilité des commettants du fait de leurs préposés ;
- La responsabilité des maîtres du fait de leurs domestiques ;
- La responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves ;
- La responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis.
Cette liste de cas de responsabilité du fait d’autrui était inspirée par deux idées :
- D’une part, il fallait trouver, pour la victime une personne qui soit plus solvable que le domestique, le préposé, l’enfant, l’élève ou l’apprenti.
- D’autre part, cette responsabilité du fait d’autrui reposait sur l’idée d’un devoir de surveillance pesant sur les commettants, maîtres, parents… relevant de leur fonction.
Cette liste était limitative et la jurisprudence a refusé de l’étendre, notamment à la responsabilité du mari pour les faits commis par son épouse. Ces régimes spéciaux de responsabilité ont évolué dans le sens du recul de l’idée de faute pour établir, dans les principaux cas, des responsabilités de plein droit.
D’une part, la seule présence de cet intermédiaire pose à la victime des difficultés de preuve, afin qu’elle parvienne à démontrer l’existence des éléments généraux de la responsabilité. D’autre part, les deux grands types de responsabilité complexe présentent chacun une physionomie particulière ; lorsqu’il s’agit de responsabilité du fait d’autrui, le dommage est causé par une personne généralement insolvable, soumise à une autorité : l’autorité suscite la responsabilité, l’insolvabilité appelle souvent la garantie d’un tiers ; lorsqu’il s’agit de responsabilité du fait des choses, le dommage est causé par une chose qui, habituellement, présente des dangers particuliers.
L’intermédiaire entre l’auteur du dommage et le dommage peut être en effet, soit une personne, soit une chose animée ou inanimée. Le type de responsabilité sera différent selon la nature de l’intermédiaire.
II – CRITIQUES SURLA
SPÉCIFICITÉ
Les critiques de cette distinction s’articulent plus
particulièrement dans l’interférence des deux responsabilités (A) mais aussi
dans le non cumul des deux responsabilités contractuelle et délictuelle (B).
A – interférence des deux responsabilités
Les points communs aux deux responsabilités se manifestent au niveau de leur mise en œuvre (1) mais aussi au niveau des possibilités d’exécration (2).
1. la mise en œuvre des deux responsabilités
Toujours est il que la mise en œuvre de cette responsabilité suppose :
1- Un fait générateur ;
2- Un dommage ;
3- Un lien de causalité.
La responsabilité civile délictuelle suppose, pour être mise en jeu, la réunion de trois conditions : un dommage, un fait générateur et un lien de causalité entre le dommage et le fait générateur. Le fait générateur peut être un fait personnel, un fait d’autrui ou un fait des choses, il s’agit alors de distinguer les trois régimes de la responsabilité civile délictuelle.
En revanche, la jurisprudence a écarté l’existence d’une obligation contractuelle de sécurité au sujet des accidents survenus aux clients dans le magasin (action délictuelle ou quasi-délictuelle).
Ainsi, l'obligation générale de surveillance des enfants confiés par les parents à une association engage la responsabilité contractuelle de celle-ci selon la 1ère chambre civile dela
Cour de cassation et sa responsabilité délictuelle selon la
2ème chambre civile.
De même, un décès accidentel d'un enfant confié à une association engage sa responsabilité contractuelle envers les parents et sa responsabilité délictuelle envers les autres membres de la famille.
Par le biais du mécanisme du forçage du contrat, on a pu admettre, l’intégration dans le contrat de certains devoirs généraux, notamment l’obligation de sécurité. Ex. : obligation du transporteur de conduire le voyageur sain et sauf à destination (action contractuelle).
Par ailleurs, concernant les groupes de contrats dans lesquels intervient un transfert de propriété d’une chose, les droits nés du contrat conclu antérieurement par l’auteur se transmettent à l’ayant cause à titre particulier lorsqu’ils sont accessoires de la chose. La nature de l’action est nécessairement contractuelle :
1. chaîne homogène (vente – vente)
2. Chaîne hétérogène (vente – entreprise)
A rebours, dans les groupes de contrats dans lesquels n’intervient aucun transfert de propriété d’une chose, la conception des droits accessoires ne peut pas recevoir application. La nature de l’action (en l’espèce : du maître de l’ouvrage contre le sous-entrepreneur) est délictuelle.
2. les possibilités d’exonération
Les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité sont valables en matière contractuelle mais pas en matière délictuelle.
Seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer les père et mère de cette responsabilité. Concernant le montant de la réparation, lorsque la responsabilité délictuelle est mise en œuvre la victime a droit à la réparation intégrale de son dommage.
Dans un premier temps,la Cour
de cassation a admis qu’il suffisait que les parents prouvent que le dommage
n’était pas dû à une faute de surveillance ou d’éducation de leur part pour
s’exonérer de leur responsabilité. Les juridictions tenaient compte notamment
de la dangerosité de l’activité de l’enfant, du caractère de l’enfant ou encore
de son âge.
Dès l’arrêt Blieck, il a été évident que la responsabilité générale du fait d’autrui ne nécessitait pas que l’on démontre la faute du gardien. Le terme de faute n’apparaissait même pas dans les motifs de l’arrêt. Dès lors, on pouvait hésiter entre un régime de présomption de faute, comme celui qui dominait la responsabilité des parents avant l’arrêt Bertrand de 1997 et un régime de responsabilité de plein droit.
Au cours de la même année, la chambre criminelle a rendu un arrêt de principe (le 26 mars 1997), communément appelé Foyer Notre-Dame des flots. Dans cette espèce, trois mineurs confiés à un foyer par le juge des enfants avaient volé un véhicule et l’association fut déclarée responsable du fait des mineurs parla Cour d’appel. Elle formait
alors un pourvoi en cassation et alléguait qu’elle avait organisé une
surveillance convenable des enfants compte tenu de leur âge avancé de sorte
qu’aucune faute ne pouvait lui être reprochée.
La Cour de
cassation a pourtant affirmé que « les personnes tenues de répondre du fait
d’autrui au sens de l’article 1384 al 1 ne peuvent s’exonérer de la
responsabilité de plein droit résultant de ce texte en démontrant qu’elles
n’ont commis aucune faute ».
Pour la responsabilité contractuelle le montant des indemnités correspond à celui prévu au contrat. En matière contractuelle, la responsabilité couvre seulement la réparation des dommages prévisibles au moment de la conclusion du contrat, sauf dans le cas où ce dommage résulte d'une faute intentionnelle, lourde ou dolosive.
L'absence de but lucratif est sans effet en ce qui concerne l'étendue des obligations assumées.
La loi applicable est en principe celle du lieu du délit (application de l’article 16 du Dahir sur la condition civile des étrangers : la lex loci delicti), le lieu où le fait dommageable s’est produit, en matière délictuelle. En matière contractuelle, c’est la loi du contrat (loi d’autonomie : article 13 du DCC) qui prévaut et c’est le lieu qui a été fixé dans le contrat qui sera applicable.
B – principe du non cumul de responsabilité
Responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle sont deux types de responsabilité à distinguer. Selon l’origine du dommage, l’action en responsabilité sera de nature de l’une ou de l’autre de manière non cumulative. Ce raisonnement est la résultante de la consécration du principe indemnitaire (1) et de la prééminence de la responsabilité délictuelle (2).
1. consécration du principe indemnitaire
Tous les dommages résultant de la vie en société ne peuvent donner lieu à réparation. La concurrence loyale d’un commerçant à l’égard d’un autre n’est que la conséquence de la liberté du commerce et de l’industrie. Le préjudice qu’elle peut occasionner ne saurait justifier une quelconque réparation.
La jurisprudence a fixé quelles sortes de dommages peuvent être réparés et les conditions auxquelles doit satisfaire le dommage pour qu’il soit réparable. Ces conditions remplies, le dommage doit être réparé.
Il ne faut pas perdre de vue que le principe indemnitaire est imprégné de plusieurs modalités :
1. on ne peut pas envisager la réparation que si l’imputabilité du dommage est établie à la charge de son auteur et les conditions de la responsabilité sont réunies ;
2. le débiteur est considéré en demeure sans autres formalités par la seule échéance du terme établi par l’acte constitutif de l’obligation ;
3. en cas d’inexécution réciproque, l’action en réparation suppose que la partie qui se plaint de l’inexécution de l’autre ait fait des offres réelles et que celles-ci sont restées sans résultat ;
4. la réparation obéit au principe indemnitaire en ce sens que le dommage ne peut être une occasion pour la victime de s’enrichir au détriment de l’auteur ;
5. la réparation a la forme d’une indemnité c'est-à-dire une somme d’argent destinée a combler la perte et à tenir lieu de celle-ci par une compensation juste et équitable ;
6. dans certains cas, peut être ordonnée aussi une exécution en nature à titre non seulement d’exécution du contrat mais de réparation ;
7. les contractants peuvent exclure la réparation du dommage indirect ou encore limitent le montant de la réparation c'est-à-dire prévoient des clauses limitatives de responsabilités et donc écartent le principe indemnitaire.
2. prééminence de la responsabilité délictuelle
Si on agit sur le terrain de la responsabilité contractuelle on ne peut pas agir en même temps sur celui de la responsabilité délictuelle et inversement.
Les deux ordres de responsabilité ne se cumulent jamais et ne sont en aucun cas laissés au choix discrétionnaire de la victime.
Il s'agira obligatoirement d'une responsabilité contractuelle si le dommage résulte d'un manquement à une obligation contractuelle, même tacite et/ou gratuite.
Par ailleurs, la responsabilité délictuelle ne s’appliquera que par défaut, lorsque la responsabilité contractuelle ne peut être invoquée.
Compte tenu de nombreux points communs, ces deux types de responsabilités sont assez souvent confondus ou considérés comme synonymes.
A ce niveau il existe plusieurs problèmes, en matière contractuelle l’incapable n’est pas susceptible d’engager sa responsabilité contractuelle, en revanche en matière de responsabilité délictuelle un incapable peut voir sa responsabilité civile mise en œuvre.
L’intérêt de ce refus de cumul c’est qu’on veut éviter que le créancier contractuel déjoue les prévisions du contrat et échappe au régime plus restrictif de la responsabilité contractuelle. Cette règle s’impose au plaideur qui s’expose à ce que sa prétention soit purement et simplement rejetée s’il se méprenne sur la nature de la responsabilité encourue.
Les juridictions pénales n’étant pas tenues à cette distinction, si le juge pénal statue sur le problème posé par la responsabilité civile il utilisera les règles de la responsabilité délictuelle.
Un premier arrêt semble avoir posé clairement le principe du non-cumul, mais il est assez ancien. C’est un arrêt rendu le 18 mars 1981 par la 2ème chambre civile à propos des responsabilités des parents et du commettant . Un mineur avait causé un accident de la circulation avec un cyclomoteur appartenant à son employeur. Étrangement,la Cour
d’appel avait retenu la responsabilité de l’employeur du fait de son employé
(au lieu de retenir la responsabilité de l’employeur de fait de la chose dont
il était resté gardien) et, dans le même temps, la responsabilité du père du
fait de son enfant. La Cour
de cassation a censuré cette analyse en affirmant clairement que « les
différentes responsabilités du fait d’autrui ne sont pas cumulatives, mais
alternatives ».
Le caractère solennel de cet arrêt de principe semble avoir été renforcé par une décision identique de la chambre criminelle en 1985 . En reprenant la formule selon laquelle les responsabilités du fait d’autrui sont alternatives, la chambre criminelle considère que lorsque les conditions de la responsabilité de l’artisan sont réunies, la responsabilité des parents est exclue .
Un arrêt plus original a été rendu à propos des responsabilités cumulées de l’Etat et d’une association du fait d’un mineur délinquant. Le mineur avait été placé en liberté surveillée auprès de l’association par le juge des enfants. Au cours de cette liberté surveillée, il avait mis volontairement le feu à un entrepôt. Le propriétaire a exercé une action en responsabilité de l’Etat et contre l’association qui avait la charge de l’enfant.
Il n’est pas question ici uniquement de contrat écrit comme on l’entend souvent, mais d’un engagement plus immatériel, pouvant être exprès ou tacite, onéreux ou gratuit.
A titre d’exemple, l’adhésion à une association équivaut à un contrat passé entre une association et un adhérent. Contrat que l’association se doit d’honorer.
Ce faisant, les dommages dont pourrait être victime l’adhérent engagerait la responsabilité civile contractuelle de l’association.
En revanche, un visiteur imprévu dans les locaux d’une association et qui subirait des dommages également imprévisibles ne pourrait être indemnisé qu’au titre de la responsabilité délictuelle de l’association, soit « extracontractuelle » en dehors de toute responsabilité pénale.
Pour autant, cette distinction est parfois bien difficile à établir par les tribunaux eux-mêmes, un même événement pouvant engager la responsabilité contractuelle d’une association envers certaines personnes et sa responsabilité délictuelle envers d’autres.
Entre la responsabilité civile et pénale il existe une dualité fonctionnelle, la responsabilité pénale ayant pour objectifs de neutraliser des individus nuisibles à la société et de les réadapter et la responsabilité civile étant tournée vers la réparation du préjudice causé, même s’il est vrai que, dans une certaine mesure, la sanction pénale et la sanction civile répondent aussi l’une et l’autre à un double désir de punition et d’intimidation, ou de dissuasion.
Il ne s’agira pour nous de traiter que des responsabilités contractuelle et délictuelle à l’exclusion de la responsabilité pénale.
La responsabilité civile délictuelle est prévue par les articles 77 à 106 du Dahir des Obligations et des Contrats (ci-après DOC). La responsabilité contractuelle s’engageant par l’inexécution d’une obligation contractuelle.
Par ailleurs, la responsabilité civile trouve sa source dans le quadrige romain auquel s’ajoute la loi.
L’intérêt de cette distinction se confine dans une double allure, c’est une arme à double détente : d’une part, la responsabilité civile permet a priori la prévention du dommage, et d’autre part elle a pour objectif a posteriori la réparation.
De ce qui précède se pose la problématique de savoir quid à propos des traits tant distinctifs que communs aux deux types de responsabilité ?
Pour pouvoir répondre à cette problématique, l’approche la plus probante pour exhiber la philosophie générale du sujet serait de traiter d’une part les spécificités des deux responsabilités contractuelle et délictuelle (I) et d’autre part étaler les critiques sur cette distinction (II).
I – SPÉCIFICITÉ DES DEUX RESPONSABILITÉS
A – la responsabilité contractuelle
1. La nature des obligations
2. Les limitations conventionnelles
B – la responsabilité délictuelle
1. La responsabilité du fait personnel
2. Les responsabilités complexes
II – CRITIQUES SUR
A
1. la mise en œuvre des deux responsabilités
2. Les possibilités d’exonération
B – principe du non cumul de responsabilité
1. Consécration du principe indemnitaire
2. Prééminence de la responsabilité contractuelle
I – SPÉCIFICITÉ DES DEUX RESPONSABILITÉS
La responsabilité civile n’est pas régie par les mêmes dispositions selon qu’il s’agisse d’une responsabilité civile contractuelle (A) ou une responsabilité délictuelle (B).
A – la responsabilité contractuelle
Le quantum des dommages intérêts et l’appréciation de la faute est différente selon la nature de l’obligation (1) et selon l’existence ou le défaut de limitations (2).
1. la nature des obligations
C’est DEMOGUE, en 1928, qui en voulant concilier entre les articles 1134 et
Le régime juridique diffère selon que l’on se trouve en présence d’une obligation de moyen ou d’une obligation de résultat.
En matière d’obligation de résultat, l’inexécution de celle-ci doit conduire à la réparation. Ce principe subit des exceptions chaque fois que l’inexécution sera justifiée par la force majeure.
Il s’agit d’un événement imprévisible, irrésistible et invincible selon la définition donnée par la jurisprudence.
Ainsi en est-il du contrat formé entre le patient et son médecin qui met à la charge de ce dernier, sans préjudice de son recours en garantie, une obligation de sécurité de résultat en ce qui concerne les matériels qu’il utilise pour l’exécution d’un acte médical d’investigation ou de soins.
Par contre, en matière d’obligation de moyen, on peut admettre qu’il ne peut y avoir que quelques cas dans lesquels la réparation du préjudice sera possible. En raison du fait que le créancier accepte dés le départ l’éventualité de l’inexécution de l’obligation, Le débiteur sera exonéré chaque fois qu’il aura fait son possible pour s’acquitter de son obligation. Il reste au créancier de prouver le contraire ou plus souvent de prouver une faute du débiteur pour obtenir la réparation.
Dans le domaine du contrat médical, le médecin est tenu d’une obligation de moyen. L’obligation pesant sur un médecin est de donner des soins conformes aux données acquises de la science à la date de ses soins ; le moyen qui se réfère à la notion, erronée, de données actuelles, est donc inopérant.
De même, la faute ne peut se déduire de la seule absence de réussite de l’acte médical et de l’apparition d’un préjudice, lequel peut être en relation avec l’acte médical pratiqué sans l’être pour autant avec une faute. L’existence d’une faute ne peut se déduire de la seule anormalité d’un dommage et sa gravité.
Il convient de signaler que certaines obligations sont aujourd’hui appelées obligations de moyen renforcées ou aggravées. On assiste souvent, en effet, à des contrats médicaux qui se rapprochent de ceux comprenant des obligations de résultat en matière de chirurgie esthétique.
Plus de la simple faute professionnelle, on s’approche de l’évaluation du résultat selon les mécanismes utilisés pour les obligations de moyen.
On constate dés lors que l’obligation de moyen n’est plus un mode d’engagement à l’abri de la sévérité de l’appréciation et de l’évaluation objective de la défaillance.
2. les remaniements conventionnels
C’est le contenu de l’obligation qu’il faut prendre en considération. Autrement dit, plus il y a d’obligations à la charge du débiteur, plus la possibilité de voir sa responsabilité contractuelle engagée est grande.
C’est les parties au contrat, de par l’autonomie et la liberté contractuelle dont ils jouissent, qui peuvent tant aggraver ou dégraver leur situation. Il existe donc des :
- Clause aggravante de responsabilité : C’est le cas des garanties conventionnelles ajoutées aux garanties légales.
- Clause restrictive de responsabilité (Clause limitative de responsabilité, Clause exonératoire de responsabilité).
Les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité sont nulles lorsqu’il s’agit d’une faute dolosive ou intentionnelle. Cette idée trouve sa source dans le principe romain CULPA LATA DOLO AEQUIPARATUR.
En général, les clauses limitatives ne jouent plus lorsqu’il s’agit de :
• Transport ;
• Droit de réparation du consommateur ;
• Produit défectueux ;
• Responsabilité du constructeur immobilier ;
• Dol
• Faute grave de négligence.
Par ailleurs, les parties peuvent insérer une clause pénale, qui est une clause par laquelle le débiteur s’engage en cas d’inexécution ou d’exécution à verser au créancier une somme forfaitaire définie à l’avance. Cette clause pénale se présente plus comme un moyen de pression permettant d’éviter les tribunaux.
Certaines clauses pénales sont prohibées par la loi lorsqu’il s’agit de:
*Bail ;
*Droit du travail ;
*Crédit.
Il faut noter aussi que le juge, s’il estime que le montant de la clause pénale est dérisoire ou trop élevé pourra le modifier. Toutefois il ne pourra pas baisser le montant à un montant inférieur au préjudice subi. Il n’est pas tenu par la qualification donnée par les parties.
Il ne faut pas perdre de vue également la prohibition des clauses abusives (qui ne semble plus protéger, désormais, que les consommateurs en tant qu’ils sont des personnes physiques, à l’exclusion des personnes morales) et qui permettrait de réputer non écrites de telles clauses d’exclusion de responsabilité.
B – la responsabilité délictuelle
L’appréciation de la responsabilité civile délictuelle est différente selon qu’il s’agisse d’une responsabilité du fait personnel (1) ou d’une responsabilité complexe (2).
1. la responsabilité du fait personnel
La responsabilité du fait personnel constitue un fait commis par une personne qui a ainsi causé un dommage à autrui.
Il y a en fait trois conditions pour engager la responsabilité civile délictuelle du fait personnel de quelqu'un, ces conditions sont assez "générales" dans le sens où l'on retrouvera la notion de faute et celle de dommage ailleurs que dans la responsabilité du fait personnel, ces trois conditions sont d’abord la faute, ensuite le dommage et enfin le lien de causalité.
Qu'est ce qu'une faute ? La jurisprudence va poser que la faute est l'erreur ou la défaillance de conduite. Il n'y a pas de réelle définition de la faute. Tel comportement n'est pas assimilé forcément à une faute dès le départ. C'est une notion "standard", ce qui signifie que son contenu dépend des circonstances. La jurisprudence a appliqué l’alinéa 2 de l’article 78 du DOC sur les quasi-délits pour la définition de la faute intentionnelle.
La faute est une notion entièrement objective. Cela signifie que si c'est apprécié en fonction des circonstances ce n'est pas apprécié en fonction du sujet "fautif".
La règle édictée par l’article 77 du DOC ne souffre d’aucune exception parce que le législateur la considère comme étant d’ordre public, cet article dispose in fine : * toute stipulation contraire est sans effet *.
Cette responsabilité ainsi exprimée comporte dans sa règle des éléments qui mettent en valeur :
le caractère contraire à la loi c'est-à-dire illégal : le dommage qui serait causé dans un contexte légal ne serait pas mis à la charge, ni inclus dans la responsabilité de son auteur ;
l’intention et la volonté de causer un dommage : toutefois l’article 78 du DOC vise aussi le dommage non intentionnel c'est-à-dire le dommage causé par la faute est défini comme consistant soit a omettre ce qu’on était tenu de faire soit à faire ce dont on était tenu de s’abstenir sans intention de nuire ;
le lien de causalité doit être établi qu’il s’agisse d’une faute intentionnelle ou non intentionnelle.
Il faut relever que l’article 78 ne vise pas seulement la commission du fait dommageable mais aussi l’abstention et les dommages causés par omission.
Ce qui compte pour la loi c’est la relation directe entre la faute et le dommage (sublata causa tollitur effectus : il n’y a pas d’effet sans cause) parce que le législateur a voulu assurer une protection aux victimes qui n’ont pas contribués au dommage qu’ils ont subi et à qui le préjudice a été causé par autrui, ce qui fait abstraction à la question de savoir * si l’auteur en causant le dommage a oui ou non tiré un profit quelconque de la situation *.
2. les responsabilités complexes
Un dommage se réalise toujours à la suite d’un concours de faits multiples et d’un enchainement de circonstances. La réparation à laquelle il peut donner dieu est, soit une responsabilité personnelle, soit une responsabilité complexe.
Lorsque le dommage suppose un intermédiaire qui obéit plus ou moins à celui qui le dirige (un enfant, une automobile), on ne peut dire qu’il résulte d’un fait immédiat de son auteur. La responsabilité à laquelle il peut donner lieu n’est plus une responsabilité du fait personnel, mais une responsabilité complexe. La responsabilité se détache alors plus ou moins de la faute, soit sur le terrain de la preuve, soit sur celui du fond du droit.
La responsabilité civile du fait d’autrui a connu une évolution similaire à la responsabilité du fait des choses mais cette évolution fut tout à la fois plus tardive et plus limitée.
A l’origine du Code civil, l’article 1384 du code civil français (article 85 du DOC) ne prévoyait que 5 hypothèses de responsabilité du fait d’autrui :
- La responsabilité des parents du fait de leurs enfants ;
- La responsabilité des commettants du fait de leurs préposés ;
- La responsabilité des maîtres du fait de leurs domestiques ;
- La responsabilité des instituteurs du fait de leurs élèves ;
- La responsabilité des artisans du fait de leurs apprentis.
Cette liste de cas de responsabilité du fait d’autrui était inspirée par deux idées :
- D’une part, il fallait trouver, pour la victime une personne qui soit plus solvable que le domestique, le préposé, l’enfant, l’élève ou l’apprenti.
- D’autre part, cette responsabilité du fait d’autrui reposait sur l’idée d’un devoir de surveillance pesant sur les commettants, maîtres, parents… relevant de leur fonction.
Cette liste était limitative et la jurisprudence a refusé de l’étendre, notamment à la responsabilité du mari pour les faits commis par son épouse. Ces régimes spéciaux de responsabilité ont évolué dans le sens du recul de l’idée de faute pour établir, dans les principaux cas, des responsabilités de plein droit.
D’une part, la seule présence de cet intermédiaire pose à la victime des difficultés de preuve, afin qu’elle parvienne à démontrer l’existence des éléments généraux de la responsabilité. D’autre part, les deux grands types de responsabilité complexe présentent chacun une physionomie particulière ; lorsqu’il s’agit de responsabilité du fait d’autrui, le dommage est causé par une personne généralement insolvable, soumise à une autorité : l’autorité suscite la responsabilité, l’insolvabilité appelle souvent la garantie d’un tiers ; lorsqu’il s’agit de responsabilité du fait des choses, le dommage est causé par une chose qui, habituellement, présente des dangers particuliers.
L’intermédiaire entre l’auteur du dommage et le dommage peut être en effet, soit une personne, soit une chose animée ou inanimée. Le type de responsabilité sera différent selon la nature de l’intermédiaire.
II – CRITIQUES SUR
Les
A – interférence des deux responsabilités
Les points communs aux deux responsabilités se manifestent au niveau de leur mise en œuvre (1) mais aussi au niveau des possibilités d’exécration (2).
1. la mise en œuvre des deux responsabilités
Toujours est il que la mise en œuvre de cette responsabilité suppose :
1- Un fait générateur ;
2- Un dommage ;
3- Un lien de causalité.
La responsabilité civile délictuelle suppose, pour être mise en jeu, la réunion de trois conditions : un dommage, un fait générateur et un lien de causalité entre le dommage et le fait générateur. Le fait générateur peut être un fait personnel, un fait d’autrui ou un fait des choses, il s’agit alors de distinguer les trois régimes de la responsabilité civile délictuelle.
En revanche, la jurisprudence a écarté l’existence d’une obligation contractuelle de sécurité au sujet des accidents survenus aux clients dans le magasin (action délictuelle ou quasi-délictuelle).
Ainsi, l'obligation générale de surveillance des enfants confiés par les parents à une association engage la responsabilité contractuelle de celle-ci selon la 1ère chambre civile de
De même, un décès accidentel d'un enfant confié à une association engage sa responsabilité contractuelle envers les parents et sa responsabilité délictuelle envers les autres membres de la famille.
Par le biais du mécanisme du forçage du contrat, on a pu admettre, l’intégration dans le contrat de certains devoirs généraux, notamment l’obligation de sécurité. Ex. : obligation du transporteur de conduire le voyageur sain et sauf à destination (action contractuelle).
Par ailleurs, concernant les groupes de contrats dans lesquels intervient un transfert de propriété d’une chose, les droits nés du contrat conclu antérieurement par l’auteur se transmettent à l’ayant cause à titre particulier lorsqu’ils sont accessoires de la chose. La nature de l’action est nécessairement contractuelle :
1. chaîne homogène (vente – vente)
2. Chaîne hétérogène (vente – entreprise)
A rebours, dans les groupes de contrats dans lesquels n’intervient aucun transfert de propriété d’une chose, la conception des droits accessoires ne peut pas recevoir application. La nature de l’action (en l’espèce : du maître de l’ouvrage contre le sous-entrepreneur) est délictuelle.
2. les possibilités d’exonération
Les clauses limitatives ou exonératoires de responsabilité sont valables en matière contractuelle mais pas en matière délictuelle.
Seule la force majeure ou la faute de la victime peut exonérer les père et mère de cette responsabilité. Concernant le montant de la réparation, lorsque la responsabilité délictuelle est mise en œuvre la victime a droit à la réparation intégrale de son dommage.
Dans un premier temps,
Dès l’arrêt Blieck, il a été évident que la responsabilité générale du fait d’autrui ne nécessitait pas que l’on démontre la faute du gardien. Le terme de faute n’apparaissait même pas dans les motifs de l’arrêt. Dès lors, on pouvait hésiter entre un régime de présomption de faute, comme celui qui dominait la responsabilité des parents avant l’arrêt Bertrand de 1997 et un régime de responsabilité de plein droit.
Au cours de la même année, la chambre criminelle a rendu un arrêt de principe (le 26 mars 1997), communément appelé Foyer Notre-Dame des flots. Dans cette espèce, trois mineurs confiés à un foyer par le juge des enfants avaient volé un véhicule et l’association fut déclarée responsable du fait des mineurs par
Pour la responsabilité contractuelle le montant des indemnités correspond à celui prévu au contrat. En matière contractuelle, la responsabilité couvre seulement la réparation des dommages prévisibles au moment de la conclusion du contrat, sauf dans le cas où ce dommage résulte d'une faute intentionnelle, lourde ou dolosive.
L'absence de but lucratif est sans effet en ce qui concerne l'étendue des obligations assumées.
La loi applicable est en principe celle du lieu du délit (application de l’article 16 du Dahir sur la condition civile des étrangers : la lex loci delicti), le lieu où le fait dommageable s’est produit, en matière délictuelle. En matière contractuelle, c’est la loi du contrat (loi d’autonomie : article 13 du DCC) qui prévaut et c’est le lieu qui a été fixé dans le contrat qui sera applicable.
B – principe du non cumul de responsabilité
Responsabilité contractuelle et responsabilité délictuelle sont deux types de responsabilité à distinguer. Selon l’origine du dommage, l’action en responsabilité sera de nature de l’une ou de l’autre de manière non cumulative. Ce raisonnement est la résultante de la consécration du principe indemnitaire (1) et de la prééminence de la responsabilité délictuelle (2).
1. consécration du principe indemnitaire
Tous les dommages résultant de la vie en société ne peuvent donner lieu à réparation. La concurrence loyale d’un commerçant à l’égard d’un autre n’est que la conséquence de la liberté du commerce et de l’industrie. Le préjudice qu’elle peut occasionner ne saurait justifier une quelconque réparation.
La jurisprudence a fixé quelles sortes de dommages peuvent être réparés et les conditions auxquelles doit satisfaire le dommage pour qu’il soit réparable. Ces conditions remplies, le dommage doit être réparé.
Il ne faut pas perdre de vue que le principe indemnitaire est imprégné de plusieurs modalités :
1. on ne peut pas envisager la réparation que si l’imputabilité du dommage est établie à la charge de son auteur et les conditions de la responsabilité sont réunies ;
2. le débiteur est considéré en demeure sans autres formalités par la seule échéance du terme établi par l’acte constitutif de l’obligation ;
3. en cas d’inexécution réciproque, l’action en réparation suppose que la partie qui se plaint de l’inexécution de l’autre ait fait des offres réelles et que celles-ci sont restées sans résultat ;
4. la réparation obéit au principe indemnitaire en ce sens que le dommage ne peut être une occasion pour la victime de s’enrichir au détriment de l’auteur ;
5. la réparation a la forme d’une indemnité c'est-à-dire une somme d’argent destinée a combler la perte et à tenir lieu de celle-ci par une compensation juste et équitable ;
6. dans certains cas, peut être ordonnée aussi une exécution en nature à titre non seulement d’exécution du contrat mais de réparation ;
7. les contractants peuvent exclure la réparation du dommage indirect ou encore limitent le montant de la réparation c'est-à-dire prévoient des clauses limitatives de responsabilités et donc écartent le principe indemnitaire.
2. prééminence de la responsabilité délictuelle
Si on agit sur le terrain de la responsabilité contractuelle on ne peut pas agir en même temps sur celui de la responsabilité délictuelle et inversement.
Les deux ordres de responsabilité ne se cumulent jamais et ne sont en aucun cas laissés au choix discrétionnaire de la victime.
Il s'agira obligatoirement d'une responsabilité contractuelle si le dommage résulte d'un manquement à une obligation contractuelle, même tacite et/ou gratuite.
Par ailleurs, la responsabilité délictuelle ne s’appliquera que par défaut, lorsque la responsabilité contractuelle ne peut être invoquée.
Compte tenu de nombreux points communs, ces deux types de responsabilités sont assez souvent confondus ou considérés comme synonymes.
A ce niveau il existe plusieurs problèmes, en matière contractuelle l’incapable n’est pas susceptible d’engager sa responsabilité contractuelle, en revanche en matière de responsabilité délictuelle un incapable peut voir sa responsabilité civile mise en œuvre.
L’intérêt de ce refus de cumul c’est qu’on veut éviter que le créancier contractuel déjoue les prévisions du contrat et échappe au régime plus restrictif de la responsabilité contractuelle. Cette règle s’impose au plaideur qui s’expose à ce que sa prétention soit purement et simplement rejetée s’il se méprenne sur la nature de la responsabilité encourue.
Les juridictions pénales n’étant pas tenues à cette distinction, si le juge pénal statue sur le problème posé par la responsabilité civile il utilisera les règles de la responsabilité délictuelle.
Un premier arrêt semble avoir posé clairement le principe du non-cumul, mais il est assez ancien. C’est un arrêt rendu le 18 mars 1981 par la 2ème chambre civile à propos des responsabilités des parents et du commettant . Un mineur avait causé un accident de la circulation avec un cyclomoteur appartenant à son employeur. Étrangement,
Le caractère solennel de cet arrêt de principe semble avoir été renforcé par une décision identique de la chambre criminelle en 1985 . En reprenant la formule selon laquelle les responsabilités du fait d’autrui sont alternatives, la chambre criminelle considère que lorsque les conditions de la responsabilité de l’artisan sont réunies, la responsabilité des parents est exclue .
Un arrêt plus original a été rendu à propos des responsabilités cumulées de l’Etat et d’une association du fait d’un mineur délinquant. Le mineur avait été placé en liberté surveillée auprès de l’association par le juge des enfants. Au cours de cette liberté surveillée, il avait mis volontairement le feu à un entrepôt. Le propriétaire a exercé une action en responsabilité de l’Etat et contre l’association qui avait la charge de l’enfant.
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Vendredi 19 septembre 2008