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vendredi 8 février 2019

LA CONCEPTION CRIMINOLOGIQUE .

  droitenfrancais       vendredi 8 février 2019


LA CONCEPTION CRIMINOLOGIQUE 





                       LA CONCEPTION CRIMINOLOGIQUE


La criminologie est une science qui étudie les causes et les caractéristiques du phénomène criminel. Elle propose un savoir sur le crime et un tableau d'ensemble des connaissances dans ce domaine.
C'est une discipline jeune et nouvelle et ce qui en fait son grand intérêt c'est qu'elle est interdisciplinaire c'est-à-dire prend en compte toutes les données dans les divers domaines qui concerne le crime (la biologie, la sociologie, la psychopathologie, la psychanalyse) mais aussi la pénologie, les sciences policières, le profilage criminel, la victimologie.

La psychocriminalité encore appelée criminologie clinique, a pour objet de déterminer les principes et les méthodes à l'aide desquels il est possible:
- de connaître la personnalité du délinquant, d'établir un diagnostic
- d'apprécier son état dangereux et l'état dangereux prédélictuel.
- d'étudier le passage à l'acte et ses conditions de réalisation
- de porter un pronostic sur les risques de récidive
- d'informer sur les traitements existants et les recherches en ce domaine
- de rechercher les liens agresseur-victime et les conséquences en victimologie



I FACTEURS INDIVIDUELS, RÔLE DE LA PERSONNALITE


Trois ordres de facteurs personnels peuvent jouer un rôle dans le passage à l'acte.
Les facteurs bio-anthropologiques (héréditaires ou non), les facteurs psychopathologiques (troubles mentaux fixés ou évolutifs) et les facteurs sociaux (éducation, milieu de vie, culture).
Lombroso a conçu le criminel comme une variante de l'espèce humaine, comme étant différent des autres hommes. Aujourd'hui, cette opinion est complètement rejetée. Etant donné, comme le précise Jean Pinatel que
« dans tout homme, un délinquant sommeille, il peut exister seulement entre le criminel et le non criminel, des différences et non une structure »,
Olof Kinberg a justement souligné que «l'humanité n'est pas divisée en deux groupes, les bons qui n'auraient jamais de pulsion et les mauvais qui en auraient et commettraient des actes qualifiés coupables par la loi pénale»
Il affirme de plus, conforté en cela par les découvertes de la psychanalyse concernant l'inconscient, que
«Ce serait une erreur grave que de croire que les individus qui commettent, parfois ou souvent, des actes asociaux ou criminels soient forcément autres que les individus qui n'en commettent pas»
On peut alors se demander, à juste titre, ce que sont ces différences qui font passer à l'acte délinquant certains individus et pas d'autres.

Il est possible de préciser une première classification des criminels en référence à la psychopathologie (malades mentaux ou atteints de troubles graves du caractère et de la personnalité, individus déficients mentaux, alcooliques ou toxicomanes). Ils représentent une minorité des cas (entre 3 et 5%).
Concernant les autres délinquants, les criminologues ont tenté d'établir des typologies.
Le psychiatre belge Ch. Andersen a défini cliniquement la personnalité criminelle comme étant « l'attitude commune à ceux qui acceptent ou recherchent les situations qui les mettent en dehors ou en opposition avec les normes admises par leur groupe»
Il a ainsi distingué:
- La personnalité criminelle vraie qui se rencontre chez les sujets ne recherchant pas la réinsertion sociale et trouvant leur sécurité dans la séparation, l'isolement et le détachement.
- La personnalité criminelle temporaire qui se manifeste chez ceux dont l'acte résulte d'une situation particulière qui ne se reproduira plus et qui réintègre le groupe social non rejeté.

Si pour la psychanalyse, la personnalité est une organisation dynamique dans laquelle pulsions et défenses entrent en jeu, pour le criminologue De Greeff, la personnalité est évolutive dans certaines limites. De son côté, Garofalo, auteur du premier ouvrage intitulé « Criminologie » en 1885, propose deux concepts opérationnels qu'il dénomme témibilité et adaptabilité.
Ce terme de témibilité a ensuite été repris sous le terme de « capacité criminelle ».
La personnalité criminelle a par la suite été définie en fonction de traits de personnalité que l'on retrouvait systématiquement dans toutes les recherches et qui serait constituée de quatre éléments s'imbriquant les uns dans les autres et constituant un « un noyau central de la personnalité criminelle et gouvernant le passage à l'acte ». Les autres variantes de la personnalité influenceraient seulement les modalités de l'acte (sa direction, sa réussite, ses raisons apparentes)
Le Noyau de la personnalité criminelle (selon Jean Pinatel)  est constitué des traits suivants :
- Egocentrisme : incapacité de juger un problème moral à un point de vue autre que personnel, (réactions d'innocence avec autolégitimation de sa conduite) et envers autrui (attitudes critiques et accusatrices, sentiment d'injustice subie), incapacité à se décentrer. L’égocentrisme se manifeste au niveau du jugement.
Attitudes rendant compte d'un défaut d'inhibition vis-à-vis de l'opprobre social.

- Labilité ou Impulsivité: dysharmonie entre l'intelligence et l'affectivité, encore appelée immaturité affective avec incapacité à profiter des expériences, à s'organiser dans la durée. C'est un défaut de l'instinct de conservation avec prédominance du principe de plaisir sur le principe de réalité. L'impulsivité est une composante de la personnalité délinquante chronique. Dans le processus d'acte grave, l'organisation dans la durée est éclipsée et parfois absente.
Plus finement, la labilité doit être distinguée, d’une part de l’impulsivité (décharge d’affect au niveau de l’agir) et de l’instabilité (besoin excessif de mouvement, puérilisme).
La labilité est essentiellement recherche d’une satisfaction immédiate.

- Agressivité: dans son aspect physiologique, elle est une pulsion motrice vers la maîtrise de l'environnement. Dans son aspect pathologique, elle est une hostilité destructrice qui peut d'ailleurs être tournée vers soi même (suicides, mutilations, toxicomanies). Chez certains individus, elle est caractéristique de la violence pour arriver à ses fins. L'agressivité diminue avec l'âge, en particulier après trente cinq ans. Elle peut émerger momentanément sous l'influence de facteurs physiques (faim), affectifs (passion), sociaux (conflits).
Dans son aspect dynamique, c’est une force motrice pour l’action. Elle reste un phénomène bio-psycho-social. Son origine réside dans l'instinct (Freud), la frustration et la culture ( Hugues Lagrange). L'urbanisation et l'alcoolisme l'amplifient.




- Indifférence affective: caractérisée par l'absence d'émotions et d'inclinaisons altruistes et sympathiques, froideur vis-à-vis du prochain. On l'a nommée insensibilité morale ou inaffectivité foncière. Elle peut résulter de carences éducatives ou de déficit constitutionnel.
On la rencontre dans l'inhibition affective de l'homicide utilitaire et le désengagement affectif de l'homicide passionnel. La connexité de l'égocentrisme et de l'indifférence affective ne veut pas dire qu'il y ait identité entre eux, mais simplement que ces traits ont des effets communs et en particulier l'inadaptation à la personnalité des autres. Tous deux sous-tendent également l'absence ou l'insuffisance de culpabilité vécue par le sujet: l'égocentrisme influençant le jugement porté sur l'acte éventuel (comportement d'autojustification systématique) et l'indifférence affective empêchant d'éprouver l'odieux de son exécution et les conséquences pour autrui.
Gina Lombroso dans la parution de son ouvrage « l'âme de la femme », chez Payot en 1929, a mis en lumière l'altérocentrisme de la femme. Elle a ouvert la voie à l'explication de la sous-représentation de la femme dans le domaine de la criminalité.

Le concept de personnalité criminelle combiné avec celui d'adaptabilité pourrait rendre compte des principaux modes de comportement délinquantiel.
J.Pinatel fait remarquer que le concept d'adaptabilité (défini par Garofalo) se situe essentiellement dans le champ social puisqu'il s'agit de la capacité à s'intégrer durablement dans la société au niveau du travail, de la famille, des relations affectives et sociales.

On pourrait ainsi définir quatre types de comportement spécifique:

1 A une capacité criminelle forte, associée à une adaptabilité forte, correspond le délinquant actif mais se contrôlant bien, dangereux pour la société du fait de la gravité des infractions qu'il commet mais difficile à appréhender et à poursuivre. C'est le type de délinquant organisé dont la forme la plus moderne est le délinquant économique mais c'est aussi le grand délinquant « ennemi public » ( type Al Capone , Mesrine).

2 A une capacité criminelle forte, associée à une adaptabilité faible, correspond le délinquant actif, passant facilement à l'acte donc multirécidiviste et sans organisation suffisante, donc souvent pris. C'est le type
« délinquant d'habitude ».

3 A une capacité criminelle faible, associée à une adaptabilité faible, correspond le sujet passant rarement à l'acte mais très vulnérable aux facteurs événementiels et facilement poursuivis. Il a le profil de l'exécutant, du
« suiveur » dans la bande délinquante organisée. Ces délinquants constituent une part importante de la population pénitentiaire.

4 A une capacité criminelle faible, associée à une adaptabilité forte, correspondrait le sujet dit «normal », bien intégré dans le système social dans lequel il se trouve, ne passant à l'acte que de manière accidentel (délinquant occasionnel) ou unique (délinquant passionnel).

Au plan pénal, où l'on distingue culpabilité et imputabilité, la capacité criminelle conditionne la culpabilité tandis que l'adaptabilité conditionne l'imputabilité.
Cette conception criminologique présente un grand intérêt mais il ne faut pas sous estimer d'autres facteurs psychologiques comme la force des pulsions et la faiblesse du moi dans certaines situations inhabituelles.

2 FACTEURS EVENEMENTIELS ET RÔLE DES SITUATIONS

Pour un certain nombre de sujets, c'est la rencontre entre leur personnalité et une situation donnée qui conditionne la passage à l'acte, soit que l'adaptabilité soit faible (délinquants d'habitude) soit que la situation soit particulièrement prégnante (délinquants passionnels)
C'est dire l'importance de l'étude des situations auxquelles peuvent se trouver confrontés les individus antérieurement à leur passage à l'acte.

O.Kinberg décrit ces situations sous le nom de « situations précriminelles » Il considère que « le comportement des hommes est déterminé par leurs tendances réactionnelles et les excitants agissant sur eux ». Il faut donc rechercher dans les situations précriminelles, les excitants qui ont pu agir sur le délinquant. Kinberg distingue ainsi trois types de situations:
- les situations spécifiques ou « dangereuses »
Ce sont celles où l'occasion de commettre un crime est toujours présente. Le délinquant n'a pas besoin de chercher une occasion ou d'en créer les conditions.
Sa personnalité animée d'une pulsion d'un certain genre en liaison avec quelques circonstances appartenant au milieu est sollicitée pour commettre l'acte délinquant.
C'est le cas du père incestueux, de la famille pathologique au long cours, de l'alcoolique violent envers une épouse soumise, du comptable peu honnête, du joueur invétéré.

- les situations non spécifiques ou « amorphes »
Ce sont celles où l'occasion de commettre un délit n'est pas présente mais doit être recherchée, ce qui exige un plan, la reconnaissance des lieux, le choix des complices..

- les situations mixtes.
Elles se retrouvent au sein des bandes organisées où le chef se trouve en situation amorphe, c'est-à-dire qu'il organise les conditions de son méfait tandis que les complices exécutants se retrouvent projetés dans une situation dangereuse où leurs pulsions sont mises à contribution et stimulées pour agir (cambriolages, braquages ou homicides)
Ce qu'il faut surtout retenir c'est l'utilité de l'approche du complexe personnalité-situation car il forme une totalité fonctionnelle.

3 MOTIVATIONS ET FACTEURS DU CRIME


Les rouages de la pensée et de l'action ne suffisent pas à expliquer les comportements, il faut aussi comprendre pourquoi les humains font ce qu'ils font ou pourquoi ils pensent le faire.

La motivation: Il est impossible d'imaginer la vie sans motivation car elle est à la base des comportements et ne peut être comprise que par rapport à l'instinct.
Un instinct est un comportement automatique et involontaire qui n'a pas fait l'objet d'un apprentissage et survient en réactions à un stimulus spécifique. L'être humain a plusieurs types d'instinct, comme l'instinct de survie et l'instinct maternel. Nos instincts nous motivent dans le sens où nous faisons ce que nous faisons parce que nous devons le faire. Nous le faisons de façon automatique et involontaire.
Les instincts peuvent être classés en fonction de leurs objectifs respectifs. Chaque instinct oriente le comportement en vue de la réalisation d'un objectif précis, comme la survie.
McDougall a identifié de nombreux instincts en identifiant d'abord leurs objectifs, notamment ceux qui consistent à élever un enfant, à chercher de la nourriture et à s'accoupler.

De nombreuses études concernant l'instinct ont été réalisées sur des animaux.
Par exemple, pourquoi les oies sauvages volent —elles vers le sud avant l'hiver ? sinon en raison de leur instinct. Konrad Lorenz a longuement observé les comportements instinctifs des animaux, c'est une approche éthologique de la motivation et d'après Petri, un éthologiste, tout comportement instinctif est une réaction à un stimulus-clé.
Chez l'animal, un stimulus-clé peut provenir de l'environnement ou d'autres membres du groupe (phénomènes de déclenchement)
Les comportements provoqués par un stimulus-clé sont des formes spécifiques de conduite, invariables et automatiques.
Konrad Lorenz a identifié ce qu'il a appelé l'empreinte c'est-à-dire l'instinct qui lie un jeune animal à celui qu'il reconnaît comme parent.
Certains criminels paraissent réagir en fonctions de stimulus-clé provenant de l'environnement ou d'autres membres du groupe ( par exemple prendre ce qui est à portée de main, pousser automatiquement une porte, agresser instinctivement une femme, arracher le sac d'une personne vulnérable. Aux questions sur leurs motivations, ils répondent « que c'était instinctif».

La théorie de Clark Hull désignée sous le nom de «théorie pulsionnelle » considère que l'individu est soumis à une pulsion (instinct) qui le pousse à satisfaire ses besoins.
Les besoins seraient générés par deux facteurs: l'homéostasie (besoins satisfaits et équilibre atteint) et la restauration de l'équilibre (besoins non satisfaits, nécessité de retrouver rapidement l'équilibre). Il existe deux sortes de pulsions :
- les besoins biologiques (pulsions primaires) la faim, la soif, le sommeil, le besoin sexuel. - les besoins secondaires qui résultent de l'éducation, de la culture, de la société.
Ces pulsions secondaires acquièrent de l'importance quand elles sont associées aux pulsions primaires. Dans ce cas, elles présentent la même exigence et tyrannie que les besoins primaires. C'est les cas lorsque le besoin d'argent est greffé sur la pulsion orale ou la pulsion sexuelle.
Beaucoup de besoins secondaires sont ainsi (par conditionnement des médias par exemple) associés étroitement aux besoins primaires et leur satisfaction est devenue nécessaire pour ressentir l'homéostasie et l'équilibre.

La théorie de la motivation de Abraham Maslow affirme que les motivations proviennent d'un ensemble de besoins à satisfaire qu'il a classés selon une hiérarchie:
- premier niveau (bas de la pyramide) : besoins physiologiques (nourriture, eau, sommeil)
- deuxième niveau: besoin de sécurité (abri et protection)
- troisième niveau : besoin d'appartenance
- quatrième niveau : besoin d'estime (situations renforçant l'estime de soi)
- cinquième niveau (sommet de la pyramide) besoin d'accomplissement (référence au besoin de se dépasser et de vivre avec un niveau de conscience de soi élevé, recherche d'une sensation de satisfaction intense)

La théorie de l'excitation maximisée rend compte du fait que la pulsion au lieu de pousser à réduire les besoins, les exacerbe jusqu'au niveau maximum. Ainsi le besoin de satisfaire la faim peut être exacerbé jusqu'à la nécessité d'ingurgiter une trop grande quantité de nourriture (boulimie, voracité) sans que l'homéostasie et l'équilibre ne parviennent à être obtenus.
C'est parfois le cas de pervers sexuels dont le niveau d'excitation sexuelle est maximal et ne leur permet jamais d'atteindre la satisfaction d'où la reproduction d'actes d’agressions sexuelles à répétition.
D'après la loi de Yerkes et Dodson, l'excitation ne doit pas être maximale mais optimale pour être compatible avec la performance.

La théorie de l'incitation, liée à la théorie de l'attente affirme que la motivation est en rapport avec l'espoir d'une récompense et l'évitement des expériences négatives.
L'espoir d'un gain important lors d'un hold up peut être une motivation importante.



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