LE CHÈQUE
I. L’EMISSION DU CHEQUE :
En tant qu’instrument de paiement, le
chèque obéit à des règles précises
régissant son émission.
Caractéristiques du chèque :
- • C’est un instrument de paiement à
vue, à l’instar des billets de banque.
Par conséquent, le chèque n’est pas
un instrument de crédit ; son
émission suppose qu’une provision
suffisante existe au préalable et
implique que le bénéficiaire peut
disposer de celle-ci immédiatement en
présentant le chèque au paiement.
Mentions obligatoires :
Pour être valable, le chèque doit
contenir les énonciations obligatoires
suivantes (conformément aux
dispositions de l’article 239 du code de
commerce):
La dénomination de « chèque » insérée
dans le texte même du titre et exprimée dans
la langue employée pour la rédaction de ce
titre.
Le mandat pur et simple de payer une
somme déterminée.
Le nom de celui qui doit payer (tiré).
L’indication du lieu où le paiement
doit s’effectuer (à défaut de cette mention,
ce lieu est présumé être celui désigné à
côté du nom du tiré).
L’indication de la date et du lieu où
le chèque est créé (en l’absence de
cette indication, le chèque est
considéré comme souscrit dans le lieu
désigné à côté du nom du tireur).
Le nom et la signature de celui qui
émet le chèque (le tireur).
Tout chèque non conforme aux formules
délivrées par l’établissement bancaire ou
dans lequel l’une des énonciations
obligatoires fait défaut, est réputé non
valable, mais peut être considéré comme
un titre ordinaire établissant la preuve de
l’existence d’une créance à l’égard du
débiteur.
Modalités d’émission du chèque :
Le chèque émis peut revêtir l’une
des formes suivantes :
1. Le chèque barré :
Le barrement du chèque est un moyen
simple de limiter le risque d’utilisations
frauduleuses en obligeant l’encaissement
par l’intermédiaire d’une banque.
Le bénéficiaire d’un chèque barré
doit donc, pour pouvoir l’encaisser,
être titulaire d’un compte.
Le chèque est barré lorsqu’à son recto
figurent deux barres parallèles. Le
barrement peut être général ou spécial
(article 280 du code de commerce).
Type du barrement
Conséquence sur le paiement du Chèque
Barrement
général
Le chèque ne
comporte aucune
désignationentre les
deux barres
Le chèque ne peut être payé que
par un établissement bancaire
Barrement
spécial
Le nom d’un
établissement bancaire
est inscrit entre les
deux barres
Le chèque ne peut être payé que
par le banquier désigné.
Remarque :
Le barrement général peut être
transformé en barrement spécial, mais le
barrement spécial ne peut être
transformé en barrement spécial (article
280 du code de commerce).
2. Le chèque certifié :
Pour s’assurer du règlement du chèque
lors de sa présentation au paiement
dans le délai de prescription légale de
certification (20 jours), le bénéficiaire
peut exiger du tireur de faire certifier le
chèque auprès de la banque tirée.
Pour cela, elle appose la griffe de certification
sur le chèque comportant :
la signature de l’établissement bancaire
toutes les mentions relatives à la
certification, à sa date, au montant pour
lequel le chèque a été établi et la désignation
de l’établissement tiré.
Ces mentions sont apposées au moyen
d’un procédé mécanique de marquage
ou d’impression offrant toute garantie
de sécurité.
La certification du chèque, en
pratique, est libellée comme suit :
« Chèque certifié sous le n° ...... conformément
aux dispositions du Dahir du 01.08.96 portant loi
n° 15-95 formant code de commerce.
- pour .......... Dh
- date de validité : date de certification + 20 jours
- le.... /.... /.... »
- Banque ................. Agence ......................
suivie de deux signatures autorisées de l’agence
bancaire.
La certification entraîne un blocage de
la provision du chèque, sous la
responsabilité du tiré, jusqu’à
l’expiration du délai de présentation au
paiement fixé à 20 jours (article 242 du
code de commerce).
II. LA CIRCULATION DU CHEQUE :
Les modalités de circulation du
chèque émis diffèrent selon sa forme :
1. Chèque « au porteur » :
Le chèque émis avec la mention « au
porteur » ou sans indication du
bénéficiaire est un chèque pouvant
circuler par simple transmission
matérielle (remise).
2. Chèque « à ordre » ou « à
personne déterminée » :
Conformément à l’article 252 du code
de commerce, le chèque « à ordre »
est un chèque nominatif qui se
transmet par la voie de l’endossement
(signature du chèque au verso)
III. LE PAIEMENT DU CHEQUE :
1. Délai de présentation du chèque :
Etant un instrument de paiement à vue,
le délai prévu par la loi pour consacrer la
plénitude des effets du chèque sont très
brefs. Le délai de présentation prévu est
de :
* vingt jours (au lieu de 8) pour les
chèques émis et payables au Maroc ;
* soixante jours pour les chèques
émis hors du Maroc et payables au
Maroc.
Ces délais commencent à courir à
partir du jour porté sur le chèque
comme date d’émission
(Article 268 du code de commerce).
La sanction de ce délai consiste en :
* la disparition du recours du porteur
contre les tiers garants, notamment les
endosseurs ;
* la fin du blocage de la provision du
chèque certifié (celle-ci n’étant bloquée
que durant le délai de présentation).
Mais, le tiré doit payer même après
l’expiration du délai de présentation
(Article 271 du code de commerce).
2. Délai de validité du chèque :
Le délai de validité du chèque est
d’un an à partir de l’expiration du
délai de présentation (article 295
du code de commerce).
Au delà de ce délai, la banque peut
refuser le paiement du chèque. Mais,
dans ce cas, la créance n’est pas
éteinte et le porteur conserve un
recours contre le signataire.
Le chèque sera alors considéré
comme une reconnaissance de dette
pouvant être utilisé comme moyen
de preuve pour engager une action
en paiement.
3. Opposition au paiement d’un
chèque :
Le tireur ne peut faire opposition au
paiement du chèque, et donc empêcher
le paiement du chèque remis à son
vendeur, que dans les cas suivants
(article 271 du code de commerce) :
* Perte du chèque ;
* Vol du chèque ;
* Utilisation frauduleuse du chèque ;
* Falsification du chèque ;
* Déclaration du porteur en état de
redressement ou de liquidation judiciaire.
Le tireur doit immédiatement
confirmer son opposition au
paiement par écrit (quel que soit le
support de cet écrit) et appuyer cette
opposition (par tout document utile).
LE CHEQUE SANS PROVISION :
La prévention des chèques sans
provision :
Précautions à prendre :
Toute personne qui remet un chèque en
paiement doit justifier de son identité au
moyen d’un document officiel portant sa
photographie (article 251 du code de
commerce) :
En ce qui concerne les personnes
physiques :
* la carte d’identité nationale ;
* la carte d’immatriculation pour les
étrangers résidents ;
* le passeport pour les étrangers non-
résidents.
En ce qui concerne les personnes
morales :
* L’identité de la ou des personnes
physiques habilitées à signer un chèque
libellé au nom de la personne morale ;
* Le numéro d’inscription à l’impôt sur
les sociétés ;
* Le numéro d’inscription au registre du
commerce ou à l’impôt des patentes.
Cette disposition aura pour
conséquence certaine de dévoiler
sûrement les titulaires illégitimes
de chèques qui se présenteront aux
guichets.
Dissuasion de l’émission des
chèques sans provision :
La banque qui refuse de payer un
chèque sans provision est tenue de
déclencher un processus
d’interdiction qui vise à contraindre
l’émetteur du chèque à régulariser
sa situation.
Interdiction bancaire
La loi dispose désormais que la
Banque constatant un incident de
paiement est tenue d’infliger à son
client des sanctions disciplinaires au
premier rang de laquelle figure
l’interdiction d’émettre des chèques
pendant dix ans.
Ce mécanisme dissuasif est en
réalité très souple car si l’interdiction
est immédiate, la régularisation est
ouverte à tout moment.
La banque qui constate un incident de
paiement doit mettre en place un
dispositif de sanctions disciplinaires
qui se déroule comme suit :
* Interdiction au tireur d’émettre des
chèques pendant dix ans à compter de
la présentation au paiement du chèque
sans provision (article 313 du code de
commerce);
* Obligation au tireur de restituer toutes
les formules de chèques détenues, y
compris celles correspondant à d’autres
comptes ouverts à son nom et à des
comptes dont il n’est que co-titulaire
en cas de compte collectif (article 315
du code de commerce);
Régularisation :
La régularisation peut intervenir sans
délai.
Le titulaire du compte dispose, à cet
effet, de deux possibilités (article 313
du code de commerce) :
Approvisionner son compte, afin
que le bénéficiaire puisse représenter le
chèque pour paiement. Il ne suffit pas
cependant de remettre en banque une
somme légèrement supérieure au
montant du chèque et permettant d’en
effectuer le paiement.
Payer directement le bénéficiaire
du chèque impayé : dans ce cas, la
justification du règlement doit être
fournie au banquier par la remise du
chèque acquitté.
En effet, le titulaire du compte doit s’acquitter d’une
amende fixée comme suit :
* 5% du montant du ou des chèques impayés
faisant l’objet de la première injonction;
*10% du montant du ou des chèques faisant l’objet
de la deuxième injonction;
* 20% du montant du ou des chèques faisant l’objet
de la troisième injonction et des
injonctions suivantes.
Procédure de recouvrement des
chèques impayés :
Le protêt :
Le déclenchement de la procédure de
recouvrement des chèques impayés
est toujours subordonné à
l’établissement d’un protêt (article 297
du code de commerce).
L’acte de protêt doit être dressé dans un
délai de vingt jours afin que le
bénéficiaire puisse conserver ses droits
de recours cambiaires contre le tireur ou
endossataires.
Si le bénéficiaire n’a pas établi le
protêt dans le délai de présentation,
il est considéré comme porteur
négligent et perd ainsi ses recours
cambiaires.
La loi innove car désormais la notification
du protêt vaut commandement de payer.
Le porteur du chèque protesté peut
solliciter une ordonnance sur requête
autorisant le secrétaire-greffier à faire
procéder à toute saisie conservatoire
contre les signataires du chèque.
A défaut de paiement à l’expiration d’un
délai de 30 jours après la saisie, le
porteur du chèque peut faire procéder
à la vente des objets saisis.
Le certificat de refus de paiement,
quel rôle dans la procédure de
recouvrement ?
La loi marocaine n°15-95 qui oblige les
banques à produire un certificat de refus
de paiement ne prévoit pas que celui-ci
puisse être utilisé comme moyen de
recouvrement.
Elle est également tenue de payer si
le chèque a été émis au moyen de
formules qu’elle a délivrées alors que
le signataire (son client) était interdit
ou dont elle n’a pas demandé la
restitution (article 320 du code de
commerce).