LES DROITS REELS PRINCIPAUX, LES SURETES ET LA PUBLICITE FONCIERE
Introduction générale :
La notion de patrimoine présente plusieurs intérêts :
- Le patrimoine est l’enveloppe dans laquelle viennent se ranger les droits patrimoniaux ;
- Le patrimoine est aussi l’enveloppe dont le contenu est influencé en cas de violation de droits extrapatrimoniaux.
C’est donc dire à quel point le patrimoine est important pour une personne juridique.
Une personne ne peut ni prêter, ni emprunter, par exemple, quand elle n’a pas de biens . C’est pourquoi ceux ci retiendrons notre attention dans une première partie avant de nous intéresser , dans une deuxième partie, aux sûretés , qui peuvent les affecter et dans une troisième partie à la publicité foncière qui conditionne, en principe, l’existence des droits réels immobiliers .
PREMIERE PARTIE : LES BIENS
Les biens sont généralement définis comme étant des choses ayant une valeur estimable ; ainsi les biens impliquent une expression patrimoniale.
En effet cette approche est inexacte dans la mesure où elle pousse à considérer comme biens non seulement des droits réels (pouvoirs exercés par une personne sur une chose) mais aussi des droits personnels (pouvoirs exercés par une personne à l’encontre d’une autre personne). Or il semble difficile à priori de considérer une créance comme un bien car l’aspect personnel, en dépit de l’expression patrimoniale, ne permet pas d’envisager l’obligation comme une véritable chose.
En réalité la notion de bien est ambiguë car elle se trouve influencée par des aspects économiques et physiques.
1. Aspect économique :
(...)
2-Aspect physique :
Les choses du monde extérieur sont physiquement hétérogènes .Le Droit prend en considération cette hétérogénéité A cet égard on distingue deux catégories de classifications, l’une fondamentale, les autres secondaires.
a - La classification fondamentale ; immeubles et meubles :
Les choses sont meubles quand elles sont susceptibles de déplacement, elles sont immeubles lorsqu’elles ne sont pas susceptibles d’être déplacées (un fonds de terre, un bâtiment, des plantations non séparées du sol)
Cette distinction est fondamentale car très schématiquement les immeubles sont beaucoup plus protégés que les meubles ; l’acquisition de leur propriété obéit à des règles plus strictes que celles des meubles.
- Les immeubles :
Le critère physique, pour déterminer des biens immeubles, ne tient qu’une place peu importante si l’on se réfère à l’article 5 du Dahir du 2juin 1915 : « les biens sont immeubles ou pour leur nature, ou par leur destination, ou par l’objet auxquels ils s ‘appliquent. »
* Les immeubles par nature :
Il s’agit de choses réellement immeubles, c’est à dire non déplaçables au moment où on les considère .La catégorie des immeubles par nature bien qu’elle paraisse homogène ne l’est pas en réalité, car elle englobe le sol qui est un immeuble par excellence par sa nature originelle.
Le caractère immobilier des constructions n’est donc pas permanent. Dès que le rapport avec le sol est anéanti ; il disparaît : on dit que les constructions ne sont immeubles que par accessoire.
Cette immobilisation par accessoire permet de mieux comprendre la notion de meubles par anticipation qui par l’effet d’un contrat sont destinés à être séparés du sol.
* Les immeubles par destination .
Ce sont des meubles par nature auxquels la loi attache fictivement un caractère immobilier, parce qu’ils sont économiquement l’accessoire d’un immeuble.
Pour que l’immobilisation par destination soit réalisée, deux conditions doivent être réunies : il faut que la personne qui l’opère soit à la fois propriétaire du meuble et de l’immeuble et il faut que le meuble soit affecté au service de l’immeuble.
*Les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent :
L’art. 8 du Dahir du 2juin 1915 vise un certain nombre de droits ayant pour objet des immeubles ; le Dahir de 1915 applique un critère physique à des droits, c’est à dire des biens incorporels n’ayant pas de matérialité. Selon la législation marocaine, les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent se répartissent en deux catégories : Les droits réels immobiliers à savoir la propriété des biens immeubles, l’usufruit des mêmes biens , le habous , les droits d’usage et d’habitation, l’emphytéose, le droit de superficie, l’antichrèse, les servitudes et services fonciers, les privilèges et hypothèques, les droits coutumiers musulmans et les actions qui tendent à revendiquer un immeuble.
Deux remarques méritent d’être faites :
1er L’art. 8 du Dahir 1915 fait figurer le droit de propriété parmi les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent, alors que le droit de propriété, se confondant avec la chose sur laquelle il porte, ne peut être qu’un immeuble pour nature.
2ème : Alors que le droit français ne considère comme droit des biens que les seules règles juridiques régissant les droits réels principaux, le droit marocain estime que même les règles juridiques intéressant les droits réels accessoires font partie du droit des biens, ne serait ce que parce qu’il énumère l’antichrèse ,l’hypothèque t le privilège immobilier parmi les immeubles par l’objet auquel ils s’appliquent.
- Les meubles :
A priori le critère de la nature physique devrait s’appliquer : est meuble toute chose susceptible de se déplacer ou d’être déplacée. Cette règle ne peut pas être toujours tenue pour valable car certaines choses doivent être considérées comme meubles bien que le critère de la nature physique ne soit pas suffisante pour caractériser une chose ; il y a lieu donc de faire le départ entre les meubles par nature et les meubles qui ne sont meubles que parce qu’il est impossible de les ranger dans la catégorie des immeubles .
* Les meubles par nature :
Le critère physique joue ici à plein ; c’est la possibilité de déplacement qui est fondamentale, même si le déplacement est exceptionnel, même si ce déplacement est retardé dans le temps . La catégorie des meubles par nature est hétérogène : de l’aiguille au paquebot les différences sont sensibles, mais il s’agit de meubles, de même le gaz , le courant électrique doivent être considérés comme des meubles.
* Les choses qui sont meubles parce qu’elles ne peuvent être rangées dans la catégorie des immeuble :
Toutes les choses qui ne se trouvent pas visées par les articles 6, 7 et 8 du Dahir du 2 juin 1915 ne peuvent être considérées que comme meubles bien que le critère de la nature physique déjà dégagé ne puisse leur être appliqué.
Ainsi sont biens meubles, les droits réels portant sur des choses mobilières et les actions en justice relatives à des meubles ; de même sont biens meubles, les parts de sociétés, la propriété incorporelle (propriété littéraire et artistique ; la propriété des brevets , des manques de fabrique, des dessins et modèles ) et la propriété du fonds de commerce (universalité mobilière).